Le Club de l’OURS a reçu le jeudi 22 septembre 2011
Albert Constantin
Architecte
sur le thème :
« La mutation du Grand Hôtel Dieu »
LE GRAND HOTEL DIEU un bel exemple de mixité urbaine, un lieu vivant chargé d’histoire et ouvert à tous
Le Projet de mutation génétique du Grand Hôtel Dieu s’inscrit dans la continuité de 14 siècles d’une histoire marquée par la générosité, le dévouement, le prestige, le monumental, la science médicale et la recherche au service des valeurs sociales.
Le roi Childebert et la reine Ultrogoth n’imaginaient pas en 542, lorsqu’ils fondèrent l’hôpital Saint Eloy quelque part sur les bords de la Saône, que mille ans plus tard, la ville de Lyon créerait en 1523 Le Grand Hôtel Dieu de Notre Dame de la pitié du Pont du Rhône, héritier de cette fondation royale.
Et à ce titre Le Grand Hôtel Dieu va bénéficier d’avantages financiers exceptionnels. Il perçoit l’octroi, reçoit des dons, des legs, est exonéré de taxes… Une situation financière qui lui permettra pendant 4 siècles un développement considérable, au point de susciter l’admiration de Joseph II d’Autriche et du Tsar de Russie. Rabelais, Soufflot, Pascalon…
C’est d’abord la construction d’un premier hôpital au XV° siècle dans lequel Rabelais occupera le poste de médecin chef de 1532 à 1535, puis au XVII° siècle lui succède l’hôpital des 4 rangs avec son petit dôme, puis la chapelle de Notre Dame de la pitié qui pendra la place de l’hôpital de Rabelais, puis Soufflot au XVIII° siècle et sa façade monumentale sur le Rhône voulu par les élus pour servir le prestige de la ville. Et enfin, Pascalon qui parachèvera l’ensemble dans sa partie septentrionale.
Certes, tout n’était pas rose, les lits étaient des lits à 4 places, il faudra attendre 1840 pour mettre en place le lit à une place. Les salles d’hospitalisation regroupaient à la même époque jusqu’à 140 malades. L’hiver, il était fréquent que la température avoisine 0°. Les recteurs désignés par les consuls de la ville pour diriger l’établissement devaient avancer sur leurs deniers personnels, l’argent nécessaire pour les travaux. La révolution française supprimera tous les privilèges et confisquera les biens du Grand Hôtel Dieu.
Ruinés, les recteurs démissionneront et en 1796, sont créés les Hospices Civils de Lyon pour gérer l’Hôpital de la Charité et Le Grand Hôtel Dieu. Les privilèges seront rétablis et les biens confisqués seront rendus. Haut lieu de la médecine D’un point de vue médical, Le Grand Hôtel Dieu a toujours bénéficié d’une réputation exceptionnelle. On lui doit beaucoup d’innovations et de progrès : Amédée Bonnet y invente la chirurgie ostéo articulaire, son élève Ollier développe la chirurgie maxillo- faciale, Destot invente la radio, pour ne citer qu’eux.
L’Hôtel Dieu fut également un lieu d’enseignement réputé pour la médecine. Bref, les lyonnais sont orphelins de leur Hôtel Dieu. Légitimité des nouvelles fonctions Après le départ des activités médicales, le projet de mutation du Grand Hôtel Dieu développé par Eiffage va chercher à trouver une certaine légitimité des nouvelles fonctions, une inspiration dans l’histoire. Les RdC seront dévolus aux commerces comme les recteurs l’avaient imposés à Soufflot pour trouver les ressources complémentaires nécessaires au fonctionnement de l’hôpital, le grand dôme, le petit dôme des 4 rangs, et le dôme Pascalon du XIX° siècle seront les symboles des nouvelles fonctions. Le grand dôme et la façade prestigieuse sur le Rhône accueilleront l’hôtel 5 étoiles, les 4 rangs et son petit dôme, partie la plus ancienne du site, gardera la mémoire du lieu en y implantant un musée de la médecine et un centre de congrès particulièrement destinés aux médecins.
Enfin, le Dôme Pascalon sera le symbole des nouvelles activités tertiaires. Respecter l’ouvrage L’organisation de ces différentes fonctions s’efforcera de respecter les valeurs fonctionnelles de l’ouvrage (galeries, circulations verticales). Et surtout Le Grand Hôtel Dieu s’ouvrira sur la ville avec la création de 6 entrées (au lieu d’une seule aujourd’hui), permettant aux visiteurs de traverser le site, de flâner à loisir en profitant des 8,5 hectares de jardins et galeries rendus publics (soit la moitié de la surface de la place Bellecour !) Les cours envahies jusque là par les voitures seront réaménagées en jardin d’apothicairerie selon la grande tradition lyonnaise des XVI – XVII et XVIII siècles.
Chacune des ces cours sera une véritable pièce urbaine et donnera accès à l’hôtel, aux commerces, restaurant, bureaux, congrès, musée. Le Grand Hôtel Dieu deviendra ainsi un bel exemple de mixité urbaine, un lieu vivant chargé d’histoire et ouvert à tous.
Par Albert CONSTANTIN, architecte (D.R.)